CENTRALE NUCLÉAIRE DE TRICASTIN
Samedi 2 juillet, vers 15 heures, une très forte explosion a ébranlé la zone de la centrale nucléaire du Tricastin [HD]. Cette explosion, immédiatement suivie d’un incendie, a dégagé un très impressionnant panache de fumée noire en direction du sud à cause d’un vent assez fort venant du nord (mistral). Ce panache était visible de très loin et notamment de l’autoroute A7 située en vue à moins de 300 m, juste de l’autre côté du canal du Rhône de Donzère Mondragon.
Le même jour, EDF a diffusé un communiqué de presse qui relate l’accident sans toutefois aborder l’essentiel. Tout d’abord, dans la première phrase du communiqué, qui, curieusement, ne comporte pas de verbe, il n’est pas mentionné d’explosion, mais seulement un incendie; cette première omission ressemble à «
une mise en bouche de mauvais goût prémonitoire ». La deuxième phrase du communiqué laisse le lecteur sur « sa faim », sic : «
Cet événement s’est déroulé dans la partie non nucléaire des installations et n’a aucune conséquence radiologique sur l’environnement et la population ». La suite, sic : «
Les sapeurs-pompiers (SDIS 26) ont été immédiatement appelés. L’incendie a été rapidement maîtrisé, vers 15h30. Il n’y a pas de blessé. L’Unité de Production N°1 était en arrêt pour sa maintenance annuelle au moment de l’événement ».
L e réacteur N°1 à eau pressurisée (REP) de 900 MW [HD] a été construit en 1974 avec mise en activité en 1980. Contrairement à l’annonce de certains médias annonçant sa prochaine fermeture, en catimini, le 4 novembre 2010, l’ASN, après sa troisième visite décennale, prolonge son exploitation pour 10 ans.
EDF, dans son communiqué, précise que le réacteur [HD coupole et cheminée rejets] était à l’arrêt lors de l’explosion et de l’incendie du transformateur, néanmoins cet arrêt, non confirmé par l’ASN qui publie les arrêts seulement au redémarrage des réacteurs, survient paradoxalement à un arrêt très récent en date du 3 juillet au 12 août 2010 pour maintenance et rechargement du combustible. Le précédent arrêt datant du 16 juin au 20 juillet 2008. Transparence oblige, nous demandons à EDF ou à l’ASN de préciser les motifs de cet arrêt du réacteur n°1, car il est paradoxal qu’un transformateur principal non alimenté servant, sic : «
à l’évacuation de la production d’électricité vers le réseau électrique national » puisse exploser!
Tous les transformateurs antérieurs aux années 1985 installés sur le site nucléaire d’EDF ou d’AREVA du Tricastin sont chargés en fluide caloriporteur inflammable polychlorobiphényle (PCB), encore appelé pyralène. À partir de 1985, le pyralène a été interdit lorsqu’il est apparu qu’il présentait un danger pour l’homme et l’environnement.
Le plan national de décontamination et d’élimination des appareils contenant des PCB a été approuvé par l’Arrêté du 26 février 2003 (document approuvé le 18 décembre 2002 par la commission PCB, Avis favorable du Conseil Supérieur des Installations classées en date du 23 janvier 2003).
AREVA et COGEMA, qui possèdent plusieurs centaines de transformateurs chargés au pyralène, dont une majorité sur le site de l’usine George Besse du Tricastin, a prévu un plan d’élimination de manière contrôlée par des entreprises agréés de tous les transformateurs, en principe avec un achèvement prévu fin 2010.
Après une étude de planification pour l’assainissement des transformateurs au pyralène réalisée en 2007, EDF, gestionnaire des 4 réacteurs de la centrale nucléaire du Tricastin, a délégué cette opération à ETDE en 2008. ETDE, qui est une filiale de Bouygues Construction spécialisée en électricité et maintenance, a pour la première fois accédé, par le biais de cette sous-traitance, à un marché jusqu’à présent réservé aux majors de l’électricité. Bien évidemment, ETDE précise qu’en ce qui concerne les remplacements des transformateurs au pyralène par des transformateurs secs de la centrale nucléaire du Tricastin, ils se réaliseront lors d’arrêts de tranche. Ce changement réalisé au niveau de l’alternateur nécessite huit à dix jours d’arrêts et, comme le précise ETDE, cette intervention oblige, sic : «
. . . de connaître parfaitement les contraintes techniques et les exigences d’EDF en matière de sécurité, sûreté, qualité et environnement ».
Questions à EDF et à l’ASN (demandes transmises à l’ASN le 03 07 2011) :
- Quelle est l’origine exacte de l’arrêt du réacteur n°1 ?
- Quelle est l’origine de l’explosion du transformateur non alimenté, puisque l’alternateur était à l’arrêt ?
- Le transformateur qui a explosé, puis brulé était-il le nouveau chargé en huile minérale ou végétale ou bien celui d’origine chargé en pyralène ?
- L’explosion et l’incendie sont-elles dues suite aux travaux d’ETDE de démantèlement du transformateur ?
Les réponses à ces questions sont essentielles car elles vont conditionner la suite des événements, à savoir : Dans le nuage de fumée et les suies d’un transformateur en feu chargé au pyralène il peut y avoir la présence de dioxine. En conséquence il est fondamental de savoir si nous sommes-nous en présence oui ou non d’une pollution environnementale à la dioxine (majeure ?) dans le couloir rhodanien.
EDF, dans son communiqué de presse, se garde bien d’aborder ces aspects qui sont essentiels sur cet accident.
Témoignage : Les précédents ne manquent pas où EDF a occulté ou minimisé cette possible contamination, soit par dioxine ou fumées toxiques, notamment après l’explosion et l’incendie de deux transformateurs au pyralène des tranches 3 et 4 de la centrale nucléaire du Braud-et-Saint-Louis. Depuis, les agents qui sont intervenus pour combattre le feu pendant 47 minutes en attente des pompiers, ceci sans appareil respiratoire autonome (ils n’existent pas !) se plaignent de ne plus dormir.
Leurs témoignages sont accablants, sic : «
Ce que nous avons vécu n’est pas anodin. Or, la direction a minimisé l’information en interne comme à l’externe. Il n’est pas question d’un départ de feu mais de deux explosions suivies d’un incendie. De quelque chose de grande ampleur (56 pompiers, une vingtaine de véhicules venus de huit centres de secours sont intervenus sur le sinistre). Nous avons utilisé seize ou dix-sept extincteurs de 20 et 50 kgs que des collègues allaient nous chercher au fur et à mesure. Et on en a manqué. À un moment, nous n’avions plus rien pour combattre le feu: on était seuls, on se sentait désemparés. On a aussi manqué de bouteilles d’oxygène. » De la dioxine dans les suies ? «
On le sait aujourd’hui, les résultats d’analyse, désormais connus, confirment la présence de dioxine dans les suies. »
«
On a peur ». Tous le disent : «
on a peur. Du feu, mais aussi des conséquences que pourraient avoir la présence de dioxine dans les suies suite à l’explosion des transformateurs à pyralène. Des conséquences pour nous, mais également pour tous ceux qui passent encore dans cette salle des machines dont certaines parties seulement ont été nettoyées. Même si nous étions équipés d’appareils respiratoires, tous ceux qui sont passés par là ont respiré les fumées, emporté avec eux, sous leurs chaussures de sécurité, des suies. »
Il reste encore de la suie un peu partout dans cet immense bâtiment qui fait peut être quarante mètres de haut, sur 200 mètres de long. «
Il faudrait absolument tout nettoyer. Vous savez, la fumée de l’incendie a été vue depuis le Médoc. Les médecins, en conférence de presse lors du point fait par la direction, affirmaient qu’il n’y avait aucune raison de s’inquiéter. Or, trois semaines après les faits, on nous fait des analyses de sang plus poussées. Et encore, à la demande des agents. Malgré l’obligation qu’a l’employeur de délivrer une fiche d’exposition aux produits chimiques, ce n’est pas encore fait à ce jour. Et ceux qui ont consulté des médecins à l’extérieur n’ont pas pu le faire dans le cadre d’un accident du travail. » – : – La poursuite de l’enquête in situ, l’attente des réponses d’EDF et de l’ASN, etc …
source:
http://noxmail.us/Syl20Jonathan/?p=25119
- 6 juillet 2011: Pré-Alerte sur le réacteur n°1 de la centrale nucléaire EDF du Tricastin. Un dossier chez Next-up.
source:
http://www.kokopelli-blog.org